Encadrement du cannabis au Québec : assurer une consommation sécuritaire pour tous
Alors que la consultation gouvernementale sur le projet de loi no 157 concernant l’encadrement du cannabis est en cours et se poursuit à l’Assemblée nationale du Québec, l’Ordre des chimistes du Québec rappelle l’importance que les chimistes professionnels soient au cœur de l’action en matière de surveillance de la production, de la distribution et de la consommation de cannabis récréatif, dans toutes les régions du Québec de même qu’au comité provincial de vigilance proposé par le gouvernement.
D’abord, comme tout ordre professionnel, le mandat de l’Ordre des chimistes du Québec est d’assurer la protection du public dans la pratique de l’expertise qui la concerne, dans le cas présent, la chimie professionnelle.
Le choix du gouvernement, à la suite de l’imposition de l’enjeu du cannabis par le gouvernement fédéral, est d’assurer la vente du cannabis dans une perspective de protection de la santé, prioritairement au simple intérêt pécuniaire des producteurs. De l’avis de l’Ordre, cette approche va dans la bonne direction.
La légalisation du cannabis est le parfait exemple d’enjeu où notre mission de protection du public prend tout son sens. En effet, la nature même du cannabis, en tant que produit de consommation, repose entièrement sur ses caractéristiques chimiques. Sans aller dans le détail, mentionnons qu’il existe plus de 400 composés organiques dans le cannabis, qui peuvent produire des dizaines de substances chimiques appelées cannabinoïdes. Le sujet est donc très pointu et seule l’expertise d’un chimiste professionnel permettra de porter un jugement opportun sur la qualité et les diverses propriétés chimiques du cannabis.
En fait, à l’heure actuelle, des chimistes professionnels sont impliqués dans la surveillance de produits alimentaires tels que le yaourt, et ce, pour de très bonnes raisons de prévention de risques pour la santé publique. Cela dit, si la chimie du yaourt peut être risquée pour la santé, il est assez naturel de reconnaître que la chimie du cannabis doit elle aussi être contrôlée.
Une concentration des composantes, principalement le THC, qui serait mal évaluée pourrait causer un préjudice pour le consommateur. Ainsi, une loi trop peu rigoureuse en matière de surveillance pourrait causer la vente de produits de qualité regrettable à des consommateurs mal avisés.
La capacité du cadre légal à assurer la sécurité du public à travers la production, la distribution et la consommation du cannabis, reposera donc en grande partie sur l’implication de chimistes professionnels dans les processus d’analyse et de surveillance prévus.
Cela va dans le même sens pour ce qui est de la capacité de la Société québécoise du cannabis (SQC) à établir un véritable lien de confiance avec les consommateurs. La société d’État devra démontrer sa capacité à garantir la qualité des produits consommés et le contrôle rigoureux de la composition chimique des produits.
Pour toutes ces raisons, l’Ordre des chimistes du Québec recommande que des chimistes professionnels soient en charge du contrôle de la qualité et de la certification des processus lors de la production, de la transformation et de la commercialisation du cannabis, ainsi que lors des tests de dépistage effectués par les autorités policières. Également, l’Ordre recommande que la SQC puisse imposer des sanctions aux fournisseurs dont les produits échouent aux tests de qualité.
L’Ordre demande donc, à l’occasion de la réflexion publique qui contribuera à former l’encadrement légal québécois du cannabis, d’être pleinement considéré comme un acteur clé de la réussite de la légalisation du cannabis au Québec. L’Ordre entend également collaborer avec tous les autres ordres professionnels qui souhaitent participer aux efforts d’encadrement du cannabis et dont les membres pourraient être amenés à y jouer un rôle important.
Martial Boivin
Président-directeur général de l’Ordre des chimistes du Québec