Le point sur le projet éolien
Des représentants de Boralex, de la MRC d’Arthabaska et d’Hydro-Québec ont pris la parole, mercredi soir à Sainte-Séraphine, devant une cinquantaine de personnes, comme ils l’avaient fait aussi la veille à Sainte-Élizabeth-de-Warwick pour faire le point sur le projet éolien Arthabaska. Et ils feront de même à Victoriaville, jeudi soir.
Après les brefs mots de bienvenue du maire de Sainte-Séraphine, David Vincent et du préfet de la MRC d’Arthabaska, Christian Côté, une représentante d’Hydro-Québec, Élisabeth Gladu, cheffe des relations avec le milieu, est venue expliquer les objectifs de la transition énergétique et l’importance d’augmenter les mégawatts par divers moyens, dont l’énergie éolienne. Après quoi, on est entré dans le vif du sujet avec les représentants de Boralex, le chef de projet, Jean-François Beaulieu, le conseiller aux affaires publiques et aux communications, Jordan Lonchamps et le directeur général de la MRC d’Arthabaska, Frédérik Michaud.
Le projet éolien Arthabaska prévoit, à ce moment-ci, l’implantation de 42 éoliennes pour la production de 265 mégawatts d’électricité : 30 éoliennes à Sainte-Séraphine, 7 à Sainte-Élizabeth-de-Warwick et 5 à Victoriaville. Au total, entre 40 et 50 propriétaires participent au projet, incluant ceux qui n’auront pas d’éoliennes, mais dont les terres peuvent être empruntées pour se rendre aux éoliennes, par exemple. « Une enveloppe compense les propriétaires à partir du moment où ils participent au projet », a fait savoir Jean-François Beaulieu.
À ce jour, différentes étapes ont été franchies : la mise en place de la société comprenant le promoteur Boralex et la MRC d’Arthabaska en mars et la signature du contrat avec Hydro-Québec en avril. Les audiences du Bureau d’audiences publiques sur l’environnement (BAPE) viendront quelque part au printemps 2025. « Les travaux dureront deux ans et demi. On prévoit les débuter au printemps 2027 pour une livraison d’électricité le 1er décembre 2029 », a indiqué le chef de projet.
Selon le scénario prévu, 55% des éoliennes se retrouveraient dans des zones en culture et 45% se situeraient dans des zones boisées.
Mais rien n’est encore définitif. L’emplacement des éoliennes peut encore changer puisque l’étude d’impact est toujours en cours. « On est en train de terminer les inventaires pour compléter l’étude d’impacts cet été. La position des éoliennes pourrait changer en fonction des inventaires, du potentiel acéricole, des milieux humides, des cours d’eau et des différentes espèces. Cela peut amener des modifications sur l’endroit des chemins et l’emplacement des éoliennes », a confié le chef de projet.
Et puis il y a le processus du BAPE et de la Commission de protection du territoire agricole du Québec (CPTAQ). « À tout moment, ils peuvent refuser complètement ou demander des modifications. Le moment où l’on saura, de façon définitive, l’emplacement des éoliennes et des chemins, ce sera à l’obtention du décret qui devrait être en 2026. D’ici là, il peut se passer beaucoup de choses », a fait remarquer Jean-François Beaulieu.
Des éoliennes nouvelles générations
Le modèle précis d’éoliennes pour le projet éolien Arthabaska n’a pas encore été choisi, mais il s’agira de la nouvelle génération d’éoliennes pouvant produire jusqu’à 7 mégawatts contrairement à celles du projet de L’Érable, des éoliennes de 2 à 3 mégawatts avec une hauteur de 98 m et des pales d’une longueur de 41 m. Pour Arthabaska, l’éolienne, d’une hauteur de 110 ou 120 m, disposera de pales deux fois plus longues. « Et on vient produire trois fois plus d’énergie. Quant au bruit, l’aérodynamisme a beaucoup été amélioré. À la source, elles émettent moins de son que les anciennes », a assuré M. Beaulieu.
La longueur des pales fait en sorte aussi qu’une plus grande distance doit séparer chacune des éoliennes, entre 600 et 800 mètres, le double de ce qu’on voyait auparavant, note le chef de projet. Ce qui réduit aussi l’impact visuel. « On a une moins grande concentration d’éoliennes et on produit trois fois plus », a-t-il précisé. Pour illustrer le tout, de nos jours, le projet éolien de 100 mégawatts dans L’Érable avec 50 éoliennes de 2 mégawatts se ferait avec 14 éoliennes. La grosseur d’un projet éolien, selon Hydro-Québec, ne se mesure pas en fonction du nombre d’éoliennes. Il faut ramener le tout en mégawatts. « En 2010, lorsqu’on parlait d’un projet de 100 ou de 150 mégawatts, c’était un gros projet. Aujourd’hui, en ce qui nous concerne, notre projet de 265 mégawatts se situe dans la moyenne », a signalé Jean-François Beaulieu.
Les retombées
Le projet éolien Arthabaska commande un investissement total de quelque 700 M $. Mais les deux partenaires, Boralex et la MRC d’Arthabaska, n’ont pas à décaisser chacun 350 M $. « Nous devons décaisser une mise de fonds et le reste est financé sur les marchés. Notre mise de fonds est de 25%, représentant 175 M $, une somme divisée entre les deux partenaires, ce qui signifie un montant de 87 M $ pour la MRC et 87 M $ pour Boralex, a expliqué Frédérick Michaud. Ce montant se paiera à même les revenus générés par le parc éolien et garantis par Hydro-Québec pour une période de 30 ans. » Les projections du projet, a-t-il dit, laissent entrevoir un revenu d’opération, pour la MRC, de 7 M $ par année, montant auquel on retranche 5 M $ pour le remboursement d’emprunt. « Ce qui fait une marge de manœuvre de 2 M $ par année dégagé en profit d’opération », a fait savoir le DG de la MRC.
Le gouvernement oblige aussi les promoteurs à verser une redevance aux municipalités de l’ordre de 6227 $ par mégawatt. Cela signifie, pour le projet éolien Arthabaska de 265 mégawatts, un montant de 1,6 M $ par année et indexé annuellement. Pour Sainte-Élizabeth-de-Warwick, par exemple, avec sept positionnements d’éoliennes, il pourrait s’agir d’un potentiel de 296 000 $ par année, « une somme importante pour une petite municipalité », a observé M. Beaulieu. De son côté, Sainte-Séraphine, avec une possibilité de 30 éoliennes, pourrait empocher annuellement 1,3 M $.
Un montant annuel d’environ 2,9 M $, annexé chaque année, est aussi consenti aux propriétaires avec des éoliennes sur leurs propriétés, de même qu’à leurs voisins.
En fait, tous les propriétaires de terrains situés à moins de 1,2 km d’une éolienne recevront minimalement un montant annuel de 500 $, montant déterminé en fonction de la surface du terrain. C’est 1% des revenus du projet qu’on veut ainsi redistribuer aux propriétaires qui se trouvent dans ce rayon de moins de 1,2 km. Cela pourrait toucher quelque 600 propriétaires, selon le chef de projet. Une telle mesure n’est pas chose courante. « C’est une compensation que nous avons mise en place, que nous avons réfléchie. À notre connaissance, on est l’un des seuls projets à mettre de l’avant ce genre de compensation. Le but est de redistribuer le plus d’argent aux gens qui ont des propriétés sur les rangs et qui n’ont pas nécessairement la possibilité d’avoir des éoliennes », a mentionné Jordan Longchamps, conseiller aux affaires publiques et aux communications chez Boralex.
Réduire les impacts
Dans l’aménagement du parc éolien, Boralex souhaite générer le moins d’impacts possible. Un programme appelé Équisol a même été développé pour la remise en culture de surfaces équivalentes de terres cultivables et forestières à haut potentiel. « Le programme consiste à mettre en valeur les terres agricoles égales en superficie à l’espace utilisé pour l’implantation des éoliennes et l’aménagement des chemins. On veut diminuer notre impact, maximiser les retombées sur les terres agricoles liées au projet. On essaie de compenser, de reboiser le plus près possible du projet, mais à tout le moins dans la MRC », indique M. Beaulieu.
« Ce programme, a renchéri Jordan Longchamps, découle directement des préoccupations qu’on a entendues depuis 2022 de la part des propriétaires participants, des opposants, des citoyens et des organisations comme l’UPA. Cette initiative s’ajoute au projet du fonds agroenvironnement de la MRC d’Arthabaska. Par ailleurs, à chacune des étapes du projet, un suivi agronomique sera effectué, comme le stipulent les ententes conclues avec les propriétaires. « Il est convenu qu’il y aura un représentant aux chantiers, un peu comme un chien de garde, un consultant des propriétaires supervisé par l’UPA », explique Jean-François Beaulieu.
À venir
Un comité de liaison du projet éolien Arthabaska, avec des intervenants de différents milieux (MRC, municipalités, citoyens, intervenants du milieu économique), sera formé très bientôt. « Présent tout au long du projet, il va s’assurer de remonter les préoccupations et les plaintes, par exemple, pouvant venir de la communauté. Le but est d’avoir un bon aperçu de ce qui se passe sur le terrain », souligne Jordan Lonchamps. Sainte-Séraphine, en raison de sa situation particulière (cinq des sept élus sont impliqués dans le projet), a son comité de liaison depuis quelques mois. Une procédure de plaintes sera également mise en place.
De plus, d’ici la fin de l’année, on verra apparaître un comité de maximisation économique. « On souhaite rassembler tous les acteurs économiques de la région pour s’assurer que les retombées économiques du projet soient maximisées, ici, dans la MRC », signale Jordan Longchamps, tout en précisant l’existence d’un registre où les entrepreneurs peuvent déjà s’inscrire. « Cela nous procure une bonne liste pour nous aider à prendre contact avec eux et nous assurer que le plus de contrats possible soient accordés aux entrepreneurs de la région. »
Le directeur général de la MRC d’Arthabaska a fait valoir un potentiel de 300 M $ de dollars pour les entreprises de la région œuvrant dans différents secteurs d’activités.
Enfin, Boralex proposera au cours de l’été un site Web complet du projet, un outil de communication plus étoffé que la seule page existante présentement. On y retrouvera notamment les informations révélées lors des séances d’information, les cartes de positionnement des éoliennes et les simulations visuelles auxquelles les citoyens ont eu droit au cours de la soirée.
La présentation a fait place ensuite à une période de questions. Le sujet du bruit des éoliennes a été évoqué à quelques reprises. D’autres questions ont porté notamment sur les redevances, sur un démantèlement éventuel à la fin du contrat, sur l’acceptabilité sociale du projet et sur la protection des espèces.