Une erreur sincère de fait quant à l’âge, plaide Me Maxime Roy

L’étape des plaidoiries par la défense a pris son envol, vendredi matin, au palais de justice de Victoriaville au procès de Jean-Christophe Martin, Pierre-François Blondeau et Dominic Vézina, accusés notamment d’agression sexuelle avec lésions sur une adolescente de 15 ans, des faits qui seraient survenus à Victoriaville en octobre 2014 à l’occasion d’une soirée «rave» tenue au Complexe Sacré-Cœur.

L’avocat de Jean-Christophe Martin, Me Maxime Roy, a plaidé tout l’avant-midi, pendant 2 h 15 minutes devant le jury formé de six femmes et de six hommes.

L’erreur constitue un moyen de défense dans certaines circonstances, a fait valoir l’avocat. «Ici, c’est une erreur de fait quant à l’âge. Le droit permet à un individu de se tromper si sa croyance erronée est sincère», a-t-il souligné, rappelant au jury que son client, dès le départ, s’est excusé. «Il aurait agi autrement, a-t-il dit, s’il avait su que la plaignante avait 15 ans. Il a ouvert son cœur, il a mis sa tête sur le billot, n’a pas été arrogant, ni prétentieux. À vous d’apprécier si ses excuses étaient sincères.»

Jean-Christophe Martin, a insisté son avocat, n’a pas cherché à éviter les questions même s’il a été confronté durement en contre-interrogatoire. «Il n’a démontré aucune faille. Aucune fois, il n’a été contredit. En aucun moment, sa version n’a été ébranlée», a précisé Me Maxime Roy.

Le bon sens, a-t-il dit aussi aux jurés, commande d’apprécier la façon dont l’accusé a témoigné. «Il l’a fait avec sincérité, humilité, sans arrogance», a soutenu l’avocat.

Selon lui, il ne peut y avoir de contradiction quant à l’âge de la plaignante qui aurait été évoqué sur le chemin du retour puisque la question ne lui a pas été posée.

«Mais quand il a appris l’existence d’une enquête policière et obtenu la confirmation de l’âge de la plaignante, mon client s’est arrêté en bordure de la route. Il a contacté son père, il a pleuré dans la salle de cour. Ça ne s’invente pas», a confié Me Roy.

Le procureur estime que Jean-Christophe Martin a raisonnablement pu croire que la plaignante avait 18 ans. «Son évaluation visuelle est raisonnable et crédible puisqu’il avait lui-même une sœur de 17 ans à l’époque. Comme DJ, il avait aussi une expérience de trois ans dans les bars. Et la plaignante, âgée de 18 ans aujourd’hui, a les mêmes traits, le même visage. Elle est pareille comme à l’époque. Il est donc crédible qu’il l’ait crue», a signalé Me Roy, tout en ajoutant que même certains témoins, le maître d’événement et une amie de la plaignante, ont fait savoir que la présumée victime faisait plus vieille que son âge.

Crédiblité et fiabilité

L’avocat de Jean-Christophe Martin a aussi attaqué la crédibilité de la plaignante, disant trouvé inconcevable qu’elle ait omis de signaler à l’enquêteur sa consommation d’une pilule d’ecstasy le soir du «party».

«Une omission curieuse, une contradiction suspicieuse. C’est impossible d’oublier ça. Un élément majeur, très perturbant qui affecte sa fiabilité et sa crédibilité», a-t-il soutenu.

De plus, Me Maxime Roy se questionne sur le fait que la plaignante, quelques semaines après les faits présumés, s’est replacée dans des conditions similaires lors d’une autre soirée. «Si l’histoire qu’elle raconte est vraie, est-ce possible et raisonnable qu’elle se replonge dans les mêmes circonstances?»

Revenant sur des photos sur lesquelles la plaignante apparaît, Me Roy a fait remarquer que son état ne l’empêchait pas d’avoir un raisonnement. «L’alcool ne peut certainement pas l’empêcher de consentir», a-t-il dit.

Quant aux souvenirs flous évoqués par la plaignante, l’avocat signale pourtant qu’elle se souvient très bien du trajet, des pièces. «Elle est volontairement floue sur certains aspects de la soirée, soient les contacts sexuels avec Jean-Christophe Martin», a-t-il noté.

L’avocat a fait valoir également que l’adolescente était en mesure de consentir puisqu’à l’Auberge Hélène, elle a exprimé son refus vis-à-vis le photographe.

La poursuite, selon Me Roy, étant incapable de démontrer un état chez la plaignante qui l’aurait empêché de consentir, a plutôt tenté une preuve par association en expliquant en détail «le bordel» lors de la soirée, le fait que bon nombre de participants étaient intoxiqués.

«Comment l’accusé a-t-il cru la plaignante concernant le consentement?», a questionné l’avocat. «Elle l’a elle-même reconnu, a-t-il dit. Elle n’a jamais dit non. Elle avoue aussi avoir consenti par des paroles et des gestes. Elle n’a jamais été contrainte, ni retenue par M. Martin, en aucun moment.»

Me Maxime Roy rejette la thèse d’une agression sexuelle. «Comment aurait-il pu commettre cet acte dans la chambre devant d’autres gens? Une femme présente n’a pas senti le besoin d’intervenir pour mettre un terme à ce qui se passait», a souligné l’avocat, rappelant que d’autres témoins directs des faits, sans pour autant intervenir. Ce qui aurait été différent, selon lui, dans le cas d’une agression.

Par ailleurs, au sujet d’une serviette imbibée de sang à l’Auberge Hélène, Me Roy croit qu’il s’agit d’une diversion par la poursuite. «En réponse à la question du juge François Huot, la plaignante a affirmé n’avoir rien remarqué», a confié l’avocat.

Me Roy a aussi invité le jury à faire preuve d’un grand scepticisme face au fait que la plaignante n’ait révélé qu’au procès (deux ans et demi plus tard) la découverte de sang dans son urine.

Quant à la présence de sang qu’on aurait retrouvé sur le bord du bain, l’avocat n’y croit pas. «Les policiers n’auraient pas pris de photos du sang sur le bain? S’il n’y a pas de photos, c’est qu’il n’y avait pas de sang», a-t-il mentionné.

En terminant sa plaidoirie, Me Roy a laissé le jury sur certains éléments de réflexion, leur indiquant la propension de la plaignante à se couvrir. «Il faut être prudent, a-t-il dit, dans l’acceptation de l’ensemble de sa version des faits.»

Il a voulu conclure sur une note positive, non en parlant en mal de la plaignante, mais en parlant en bien de son client. «C’est avec émotion qu’il s’est excusé. Dans son témoignage, il a déclaré : c’est à ce moment que mon cauchemar a commencé. C’est maintenant le temps de le réveiller de son cauchemar et de le retourner à sa famille en prononçant un acquittement sur les quatre chefs d’accusation», a-t-il conclu.

Les trois accusés, rappelons-le, font face à des accusations d’agression sexuelle avec lésions sur une adolescente de moins de 16 ans, agression sexuelle avec la participation d’une autre personne, contacts sexuels et incitation à de tels contacts.