L’ex-shérif du palais de justice subit son procès

VICTORIAVILLE. Le procès de l’ex-shérif du palais de justice de Victoriaville, Karine Prince, a pris son envol, lundi matin, devant le juge Claude Provost de la Cour du Québec.

La résidente de Saint-Christophe-d’Arthabaska, âgée de 35 ans, fait face à deux chefs d’accusation d’entrave à la justice et d’abus de confiance.

Le ministère public lui reproche, entre octobre 2011 et février 2012 d’avoir tenté d’entraver le cours de la justice en acceptant de collaborer ou en informant une présumée organisation criminelle.

On l’accuse aussi d’abus de confiance relativement à une prétendue collaboration avec une organisation criminelle.

Avant la suspension pour l’heure du dîner, trois témoins ont été entendus. Le premier témoignage s’est fait par télétémoignage. Une ex-directrice par intérim du palais de justice de Victoriaville est venue expliquer le rôle que jouait Karine Prince, une technicienne en droit, qui agissait aussi comme juge de paix. Elle traitait, entre autres, des mandats de perquisition.

Par la suite, deux agents d’infiltration ont été interrogés par Me Louis-Charles Bal de la poursuite et contre-interrogés par l’avocat de Karine Prince, Me Michel Dussault.

Le premier agent d’infiltration a expliqué qu’il avait pris contact au début de juin 2011 avec Carl Verville, le conjoint de l’accusée.

Le 31 mars 2014, Verville a été condamné à une peine de 10 mois d’emprisonnement dans la collectivité après avoir reconnu sa culpabilité à des accusations de trafic de stupéfiants et de complot en vue de trafic.

L’agent d’infiltration a expliqué qu’il avait contacté Verville en vue de l’achat de stupéfiants.

Des transactions ont été effectuées. À un moment, l’agent d’infiltration et son équipe préparent un scénario de crédibilité pour dissiper les soupçons ou les craintes chez le trafiquant.

En octobre 2011, on fait appel à une agente d’infiltration pour créer une ambiance dans le but de s’approcher de Karine Prince.

On en arrive à convenir d’un souper au restaurant. Il y est notamment question de stupéfiants. Karine Prince n’a offert de réaction particulière, selon le témoin.

L’agent d’infiltration et un collègue ont, en janvier 2012, fourni une adresse sur la route de la Grande-Ligne et tenté d’obtenir la collaboration de l’accusée. «Elle a expliqué qu’elle ne pouvait pas voir toutes les adresses dans les mandats de perquisition. On ne les voit pas dans les télémandats. C’est ce qu’elle nous a dit», a raconté l’agent d’infiltration.

L’agent, un bon jour, l’appelle au palais de justice. «Je n’ai rien vu aujourd’hui, a-t-elle confié», a précisé le témoin.

En contre-interrogatoire, l’agent a reconnu qu’il savait que l’accusée ne lui disait pas la vérité en affirmant «n’avoir rien vu aujourd’hui» puisqu’elle avait en main un faux mandat de perquisition.

L’agent savait aussi qu’un mandat d’écoute électronique avait été refusé, tout en indiquant que lui-même n’a enregistré aucune conversation.

Interrogé par Me Dussault à savoir s’il croyait que Mme Prince était impliquée dans le trafic de stupéfiants, le témoin a répondu : «Elle n’en a pas fait directement, mais elle sait qu’il y a trafic. Mais elle est impliquée indirectement. Elle profite du fruit défendu.»

Reste que le témoignage de ce premier agent d’infiltration n’a pas impressionné le juge Claude Provost. «Les trois quarts de son témoignage ne sont pas recevables. On nage en plein ouï-dire. J’ai peur de me noyer, a lancé le magistrat. Moi, je veux des faits. Je m’en fiche des opinions et des impressions.»

Le deuxième agent d’infiltration, pour sa part, a expliqué sa participation à l’intervention du 26 janvier au domicile de l’accusée et de son conjoint.

Les deux agents, à ce moment, ont tenté d’obtenir des stupéfiants. «Mme Prince était près de nous, mais elle n’a eu aucune réaction apparente», a souligné le témoin, notant aussi qu’au cours de la conversation où ils lui ont demandé sa collaboration, elle a expliqué qu’elle ne pouvait tout voir sur les mandats. «J’ai compris qu’elle disait : ne soyez pas fâchés si je ne vous rappelle pas», a précisé l’agent qui a terminé son témoignage à 12 h 20.

Le procès reprend à 14 h.