«Des situations tellement désolantes… », souligne le juge Langelier

JUSTICE. Le juge Bruno Langelier de la Cour du Québec devra imposer, le 17 février, une peine à une jeune femme de 30 ans, Laetitia Angers, qui a reconnu sa culpabilité, le 27 février 2015, à deux chefs d’accusation de trafic de cocaïne.

La Victoriavilloise, âgée de 30 ans, une infirmière de profession, a été arrêtée en lien avec le projet Macramé. Mais ce dossier, compte tenu des circonstances bien particulières, a été retiré de Macramé. «Elle ne faisait pas partie de la rafle du 16 avril. Son implication est beaucoup moindre», a précisé, d’entrée de jeu, le procureur aux poursuites criminelles et pénales, Me Éric Thériault.

En fait, c’est le conjoint de l’époque de la jeune femme qui jouait un rôle plus actif. «L’accusée, en fait, avait, à la demande de son conjoint, répondu au téléphone. À deux reprises, elle l’a remplacé pour une transaction de drogue», a indiqué le procureur de la poursuite.

Lors de ces deux occasions, en l’espace d’un mois, la jeune femme s’est déplacée pour effectuer la livraison de cocaïne dans des stationnements d’établissements hôteliers à deux supposés clients qui étaient, en fait, des agents d’infiltration.

En présentant sa suggestion de peine, Me Thériault a fait valoir un rapport présentenciel très positif, ajoutant que l’accusée a toujours eu une bonne collaboration avec les policiers, que les infractions ont été commises dans un court laps de temps, qu’elle était une infirmière appréciée qui effectue un bon travail. «Il y a un risque qu’elle perde son emploi, ce qu’on ne souhaite absolument pas, mais cette décision ne nous appartient pas», a-t-il confié.

Le représentant de la poursuite a proposé une alternative à la détention, c’est-à-dire la réalisation de 240 heures de travaux communautaires à l’intérieur d’une période de probation de deux ans. «Je pense qu’il s’agit d’une peine appropriée», a souligné Me Éric Thériault.

Mais, en défense, Me Mylène Lavigne n’est pas de cet avis. «Si le Code criminel le permettait, j’aurais plaidé pour une absolution», a-t-elle fait valoir, rappelant le contexte particulier de cette affaire.

«Le père de ses enfants est son ex-conjoint. Elle s’est retrouvée, si on veut, entre l’arbre et l’écorce. Elle a fait la livraison de cocaïne pour éviter un malaise, un conflit avec son conjoint de l’époque», a expliqué Me Lavigne.

L’avocate a plaidé pour que le magistrat penche du côté d’une sentence suspendue. «Ma cliente est infirmière depuis neuf ans. Ces accusations pourraient avoir un impact pour elle qui aurait des comptes à rendre auprès de son ordre professionnel. Une sentence suspendue pourrait montrer que la Cour a considéré les éléments particuliers de cette affaire», a indiqué Me Lavigne, affirmant que sa cliente ne présentait pas de risque de récidive, qu’elle ne constitue pas un danger pour la société. «On ne risque pas de la revoir, ici. Il s’agit d’une situation exceptionnelle», a poursuivi l’avocate.

«Ce sont des situations tellement désolantes de voir une personne avec son statut et faire face à des problèmes juridiques», a exprimé le juge Bruno Langelier précisant vouloir favoriser sa réhabilitation. «La société serait perdante si vous perdiez ce que vous avez acquis», a confié le magistrat tout en rappelant la difficulté que représente la détermination d’une peine. «Il faut tenir compte de différents facteurs. Je veux éviter un grand préjudice à long terme, a-t-il noté, mais le législateur nous laisse très peu de possibilités.»

Le juge a tenu à se donner un certain temps pour produire un jugement écrit, pour mieux le structurer.

La drogue, un fléau

Lors de plusieurs causes, vendredi, le juge Bruno Langelier a eu l’occasion de s’exprimer sur les ravages de la drogue.

Dans le dossier d’Alexandra Hua, il a noté que, malheureusement, des gens de bonne réputation, bien entourée de proches aux valeurs très positives, se laissent «convaincre, embarquer» dans une situation de crimes semblables.

«Peut-être aussi qu’on a tendance à banaliser la consommation. Pour certains, il y a l’appât du gain. Mais la drogue, a-t-il soutenu, entraîne des problèmes sociaux importants et amène la criminalité et le crime organisé. Macramé, c’était du crime organisé impliquant de jeunes personnes. Cela a mené à l’arrestation d’une quarantaine de personnes.»

Le magistrat a dit souhaiter que les peines qu’imposent les tribunaux puissent amener certains individus à réfléchir. «Mais on n’est pas sans savoir que d’autres prennent la relève. C’est une roue qui tourne», a-t-il conclu.