Aline Michaud subit son procès pour agression sexuelle

Le procès d’Aline Michaud, accusée d’agression sexuelle, a officiellement pris son envol, mardi avant-midi, au palais de justice de Victoriaville.

La femme de 62 ans fait face à une accusation d’agression sexuelle sur une jeune fille d’âge mineur, des faits qui se seraient produits à Warwick entre le 1er janvier 1988 et le 21 octobre 1990.

Peu après 9 h 30, on a complété la composition du jury. Les jurés 9 et 4 ont été remplacés. «Vous n’avez pas à vous soucier du pourquoi et du comment», a indiqué le juge Louis Dionne de la Cour supérieure du Québec aux 14 membres choisis pour former le jury.

Me Michel Verville de la poursuite avec le premier témoin entendu, l’enquêteur François Beaudoin de la SQ. (Photo www.lanouvelle.net – Archives)

Le magistrat a expliqué qu’en ce temps de pandémie, deux jurés additionnels ont été sélectionnés pour faire face aux possibles imprévus.

Les 14 jurés entendront toute la preuve. Puis, avant les délibérations, deux jurés, tirés au hasard, seront exclus, la loi prévoyant un nombre maximal de 12 personnes pour déterminer de la culpabilité ou non d’un accusé.

Avant l’audition du premier témoin, le juge Dionne y est allé de ses directives préliminaires au jury, informant les jurés de leur rôle de juges des faits.

Il leur a expliqué ce qu’est la preuve, ce qui en fait partie. «Vous devez l’examiner avec un esprit ouvert, sans préjugé ni sympathie envers qui que ce soit», a précisé le magistrat.

Le président du Tribunal a aussi instruit les jurés sur le fardeau de la poursuite de prouver l’infraction reprochée hors de tout doute raisonnable alors que l’accusée Aline Michaud n’a rien à prouver et n’est pas tenue de témoigner.

Les jurés, a fait savoir le juge, ont notamment à déterminer de la fiabilité et de la crédibilité des témoignages qu’ils peuvent accepter en tout, en partie ou pas du tout. «C’est la force de la preuve qui compte et non le nombre de témoins», a souligné le juge Dionne, tout en rappelant le plus important principe, celui de la présomption d’innocence qui s’applique tout au long du procès.

Le fardeau de prouver la culpabilité hors de tout doute raisonnable repose sur le ministère public. Cette notion de doute raisonnable est fondée sur «la raison et le bon sens», a notamment rappelé le magistrat.

Les témoins de la poursuite

Le ministère public, représenté par Me Michel Verville,  a fait savoir qu’il allait faire entendre deux témoins au cours de ce procès, dont la plaignante.

Comme premier témoin, le procureur de la poursuite a interrogé l’enquêteur au dossier, le sergent François Beaudoin de la Sûreté du Québec.

Le policier a raconté que tout a commencé par la réception d’une plainte au poste de police le 31 mars 2015. «La plaignante s’est présentée au poste de police pour y faire une déclaration écrite dans laquelle Mme Michaud est nommée comme suspecte», a-t-il souligné.

Le 2 décembre 2015, l’enquêteur, muni d’une autorisation judiciaire, s’est présenté avec d’autres policiers pour une perquisition au domicile de l’accusée. «On s’y rend pour prendre des photos spécifiques et générales de l’endroit», a expliqué le policier.

Un technicien du Service de l’identité judiciaire a procédé à la prise de photos. Des photos de deux albums, d’ailleurs, ont été présentées et expliquées aux jurés.

Sur place, par ailleurs, l’enquêteur Beaudoin a expliqué à l’accusée l’autorisation judiciaire et son but. L’accusée a aussi accepté volontairement de livrer sa version.

Par la suite, l’avocat de l’accusée, Me Michel Lebrun, a contre-interrogé le policier, avant que la Couronne n’appelle à la barre la plaignante.

La femme, âgée aujourd’hui de 47 ans, a relaté qu’Aline Michaud, nouvelle conjointe de son père, est entrée dans sa vie alors qu’elle avait environ 8 ans.

«Cette femme n’avait pas la fibre maternelle. On a été imposé à elle. Elle ne faisait jamais de caresse, n’a jamais dit : je t’aime. Elle ne faisait pas d’activités avec nous», a-t-elle confié. «Elle a demandé à ce qu’on l’appelle maman, mais elle n’a jamais su c’était quoi être maman, n’a jamais pris ses responsabilités de mère et voir à ce qu’on ne manque de rien», a-t-elle ajouté.

Questionnée sur ce que ressemblait la vie à l’époque, la plaignante a raconté avoir vécu de l’intimidation. «Elle nous faisait porter du vieux linge d’il y a 20 ans. Dans l’autobus, on faisait rire de nous», a-t-elle signalé.

Me Verville de la poursuite, entrant dans la vif du sujet, l’a interrogée sur l’agression dont elle aurait été victime au sous-sol de la demeure du rang 4 Est à Warwick, «sur le tapis à cul» près du foyer. Une pièce où se trouvait un bar également.

En pleine nuit, vers 3 h possiblement, la plaignante, âgée alors d’environ 15 ans, dormait dans sa chambre lorsque son père lui a demandé de descendre au sous-sol, là où, a-t-elle soutenu, on l’aurait fait boire de l’alcool et fumé un joint.

Puis, selon son témoignage, le père lui aurait demandé d’aller s’étendre sur le tapis. «Il a demandé à Aline d’aller chercher le vibrateur et de me le passer sur le clitoris», a-t-elle fait savoir.

Aline Michaud se serait assise à ses côtés pour ensuite s’exécuter. La plaignante n’a pu dire combien de temps cela avait duré. «Je ne sais pas. C’était long, a-t-elle exprimé. C’est pas une affaire le fun, ça faisait mal.»

À une question sur son habillement, elle a laissé tomber : «Je ne portais rien. C’était nudiste chez nous».

Une fois l’événement terminé, l’adolescente s’est alors dirigée vers sa chambre.

Cette agression présumée, la plaignante la situe dans le temps durant la période hivernale à la suite d’un voyage dans le sud durant les fêtes.

L’interrogatoire a pris fin à midi. Après une pause de 15 minutes, Me Michel Lebrun a ensuite entrepris son contre-interrogatoire.

À la question si l’accusée avait déjà été violente envers elle, la plaignante a répondu par la négative, tout en ajoutant cependant certains épisodes de bras serrés et de claques au visage. «Pourquoi ne pas en avoir parlé?», lui a demandé Me Lebrun. «Je n’ai pas mangé une volée», a-t-elle noté, précisant que c’est la première fois qu’elle parle de tels incidents. «Depuis six ans qu’on est en procès, ça fait remonter des souvenirs qu’on ne veut pas», a-t-elle dit.

«Vous ne l’avez jamais aimée?», lui a demandé l’avocat. «Sa méchanceté fait en sorte qu’on ne peut aimer une femme de même, une personne froide. Jamais une caresse, un réconfort ou un je t’aime», a-t-elle exprimé.

À midi et demi, l’audience a été suspendue pour l’heure du dîner. Le contre-interrogatoire reprendra à 14 h.