Malgré la maladie, Karine Brunel garde espoir
« Vous avez une tumeur cérébrale. » Une phrase que Karine Brunel, originaire de Tingwick, a entendue en février 2022, comme l’entendent d’ailleurs 27 Canadiens chaque jour. Moins de deux mois plus tard, le 1er avril, la femme de 36 ans a été opérée. Malgré cela, elle n’en a pas fini avec la maladie. Mais, il y a tout de même de l’espoir.
En entrevue téléphonique avec le www.lanouvelle.net, Karine Brunel raconte que, pendant 10 ans, elle ressentait certains petits symptômes, notamment des maux de tête. « Jamais rien de très grave. Ma médecin me prescrivait des antidépresseurs, me disait de me reposer, que ça allait passer, que c’était dans ma tête et possiblement un burn-out. Mais ça ne passait pas. J’avais des étourdissements. » En 2018, son système immunitaire a dégringolé. « Il essayait de combattre la tumeur présente, semble-t-il, depuis 10 ans, selon la taille. J’attrapais tout ce qui passait. Je dormais toute la journée », se souvient-elle.
Puis en février 2022, Karine Brunel a subi des crises d’épilepsie fulgurantes dans son sommeil, dont une particulièrement saisissante dans la nuit du 14 au 15 février 2022. Ce matin-là, croyant à un possible trouble du sommeil, elle décide de suivre la suggestion d’une amie et de se rendre à l’hôpital de Lévis, dans la région qu’elle habite. Dans l’établissement hospitalier, on l’informe qu’elle devait aller en neurologie. « On me dit de suivre la ligne bleue. J’essaie, mais je me perds dans l’hôpital », raconte-t-elle.
Après c’est le noir total. Karine a fait une crise et a perdu conscience. Elle s’est réveillée, couchée sur une civière, quatre personnes au-dessus d’elle. « On me dit alors que j’ai été inconsciente pendant 48 minutes, que j’avais fait une crise d’épilepsie. Puis, sans avertissement, sans préliminaire, ils m’annoncent qu’ils ont fait des tests qui ont révélé que j’avais une tumeur au cerveau », relate-t-elle. C’est le choc à l’annonce de cette terrible nouvelle. Difficile à croire même. « Je ne le réalisais pas. Ça ne se pouvait pas. On me montrait la radiographie et la tumeur de 5,25 cm. J’étais dans le déni. Je ne voulais pas que ce soit ma tête. »
Par la suite, tout s’est rapidement enchaîné pour Karine Brunel qui a vu une neurologue et obtenu une médication pour prévenir les convulsions. « Mes parents ensuite m’ont ramenée à Tingwick pour prendre soin de moi. Je n’avais plus le droit de conduire, plus le droit d’être seule. Il fallait que je sois accompagnée en tout temps. Je dormais même avec ma mère parce qu’il y avait un certain danger », note-t-elle. D’autres crises sont survenues régulièrement, aux deux jours environ, mais moins importantes en raison des médicaments. Mais chaque fois, c’était l’ambulance direction Hôtel-Dieu d’Arthabaska. « Cependant, comme l’hôpital n’a pas de spécialiste pour les tumeurs cérébrales, tout ce qu’on pouvait faire, c’était d’augmenter ma dose. J’étais assommée comme un cheval. Mais, après ma troisième visite, je pense, ils m’ont transférée à l’Enfant-Jésus de Québec où j’allais être opérée le 1er avril 2022. «
Avant l’intervention chirurgicale, la neurochirurgienne l’informe des complications pouvant survenir : crise cardiaque, décès sur la table d’opération ou un réveil avec un handicap physique ou mental. « J’ai alors fait le deuil de ma vie. Dans ma tête, je n’allais pas revenir comme j’étais, j’allais probablement mourir. En un mois et demi, j’ai donc signé un paquet de procurations, j’ai fait mon testament et organisé mes funérailles », relate-t-elle. La journée de son opération, elle n’a que bien peu de souvenirs, se rappelant seulement de son arrivée à l’hôpital, d’avoir enfilé sa jaquette et d’avoir placé ses effets personnels dans un casier. Après, c’est le vide. « Paraît que j’ai été opérée seulement à midi 30. On m’a aussi dit que j’ai fait le speech (comme un dernier adieu) à mes parents. Je leur disais de profiter de la vie. »
L’opération s’est bien déroulée. « Je suis encore là, me suis-je dit en me réveillant. J’avais conscience que j’étais dans une salle de réveil. À cause de la morphine, je ne ressentais aucune douleur, mais j’avais faim. Sauf que j’ai perdu l’élocution : je ne disais que oui, non, encore, la base quoi! » En raison de la pandémie, son séjour à l’hôpital aura été bref : à peine quatre jours. Demeurant chez elle dans la région de Québec, pour être près de l’hôpital, Karine se considère chanceuse d’avoir pu compter sur ses parents qui ont pris soin d’elle. « J’étais hypersensible au bruit, à la résonnance et aux lumières. Autre chose aussi, je n’avais pas d’émotions, ni joie, ni peine. Au neutre. Ça a duré plusieurs mois, ce qui inquiétait mes parents, mais c’est revenu progressivement tout comme l’élocution », mentionne-t-elle.
Retour à Tingwick
Fin mai 2022, les parents ramènent leur fille à la maison, à Tingwick. Karine Brunel a commencé à prendre du mieux. « J’y ai passé tout l’été. J’ai commencé à prendre des marches. En août, j’ai effectué un retour chez moi et j’ai récupéré mon permis de conduire. Ça allait mieux », confie-t-elle. Karine reprend une vie sociale, s’adonne à diverses activités, comme le yoga, et effectue un retour progressif au travail à son poste de conseillère en marketing chez Desjardins. « Tout allait de mieux en mieux, mais j’ai commencé à avoir des maux de tête, de pire en pire. Cela s’est transformé en migraines fréquentes, ce qui m’a obligée à réduire mes heures de travail et à arrêter mes activités sociales. »
Au mois de mars, elle se soumet à un examen de radiologie, une IRM (imagerie par résonnance magnétique. « L’IRM est belle. En fait, l’opération crée des cicatrices internes et il se peut que de l’inflammation demeure pour un an, explique Karine Brunel. En mars, l’IRM a montré que la cicatrice avait diminué, ce qui est super encourageant pour moi. La tumeur n’était pas revenue.
Ils ont enlevé ce qu’ils ont vu. » Mais la tumeur finira par revenir. D’autres cellules invisibles pour le moment peuvent continuer à se multiplier et à progresser. Karine fait tout ce qu’elle peut pour mettre toutes les chances de son côté. « Moi j’ai changé mon alimentation. Je fais tout pour que mon système immunitaire puisse combattre les cellules, sauf que le pronostic, c’est qu’il vont réopérer dans un horizon de six à huit ans. »
Cependant, la Tingwickoise d’origine voit de l’espoir dans les travaux du Dr David Fortin de l’Université de Sherbrooke sur des méthodes qui permettraient de défier l’évolution rapide de ce cancer incurable, dont le développement d’une forme de chimiothérapie révolutionnaire basée sur l’ouverture de la barrière hématoencéphalique permettant aux médicaments anticancéreux d’atteindre la tumeur cérébrale en quantité suffisante pour être efficaces. « C’est prometteur, c’est un espoir pour moi étant donné que ma tumeur a 100% des chances de revenir. Je mets beaucoup d’espoir dans cette recherche parvenue à des tests sur des humains. J’aimerais vraiment pouvoir éventuellement en profiter même si cela est très invasif. Si ça peut me sauver la vie ou me la prolonger de cinq ans, je vais le prendre », exprime-t-elle.
Invitation à la marche
Karine Brunel s’implique auprès de la Fondation canadienne des tumeurs cérébrales qui, annuellement, tient une marche. Et pour la toute première fois, le samedi 3 juin, se tiendra la Marche des tumeurs cérébrales de la Ville de Québec. Les intéressés peuvent y participer en personne ou s’inscrire à la Marche virtuelle nationale. « J’essaie de m’impliquer le plus possible pour amasser des fonds et faire avancer la recherche. Car ça pourrait me sauver la vie ou l’améliorer pour plusieurs années. Et pas juste la mienne », observe-t-elle.
Dans la Vieille Capitale, le matin du 3 juin, Karine fait partie des personnes qui prendront la parole. « J’y ferai un discours de cinq minutes pour raconter mon histoire et couper le ruban pour l’ouverture de la marche. C’est vraiment important pour moi d’y être avec ma famille pour aller marcher. » Sur place, les inscriptions commenceront dès 8 h 30 à la Fontaine de Tourny devant le Parlement. Pour en savoir plus, consultez le https://btfc.akaraisin.com/ui/BTW2023FR/g/38420
Leçons de vie
La maladie t’apprend beaucoup de choses, dit Karine Brunel et remet en perspective toutes tes priorités. « Ça nous fait faire un 180 degrés. Je me suis mise à prioriser la santé que je tenais pour acquise. J’ai changé toute mon alimentation, je priorise l’activité physique, je me suis mise à faire de la méditation. Le travail n’est plus ma priorité. Je priorise beaucoup plus ma famille, mes amis. Ce que ça m’a le plus appris, c’est la résilience. Je m’émerveille dans toutes les petites choses de la vie. Chaque jour je la remercie d’être encore là », exprime-t-elle, tout en disant éprouver beaucoup plus d’empathie pour tout un chacun. « Parce que l’on ne connaît pas ce que chacun vit au quotidien. On a tous nos petits combats personnels. J’essaie de moins porter de jugement et d’avoir plus d’empathie. » Si la vie lui accorde cette chance, Karine aimerait pouvoir, dans un livre, raconter plus en détail son histoire, relater tout ce qu’elle a traversé. « Si je peux aider, mais il me faudra avoir du temps… » Pour consulter la page de Karine et/ou faire un don : http://bit.ly/3lXR42h