L’Arterre : pour faciliter l’accès aux terres agricoles
L’Arterre Centre-du-Québec est un service axé sur le maillage d’aspirants-agriculteurs et de propriétaires de terres agricoles. Il aide à l’exploitation maximale des espaces cultivables, mais surtout à des agriculteurs en devenir qui souhaitent avoir un accès à ces terres.
Car il faut bien l’avouer, les lots cultivables disponibles sont de plus en plus rares et surtout inaccessibles financièrement pour la majorité de ceux qui voudraient les exploiter. L’achat d’acres est quasi impossible pour ceux qui ont pourtant cette envie de nourrir les autres. L’Arterre vient jouer un rôle primordial en faisant le pont entre les propriétaires et des aspirants à cette terre.
Par exemple, l’organisme, encore méconnu, propose des listes de propriétés terriennes qui pourraient être louées et ainsi exploitées. « Il y a plein d’ententes ou de partenariats possibles », indique Elizabeth Gagné-Gauthier, coordonnatrice régionale de l’Arterre et agente de maillage.
« Le but est de faciliter l’accessibilité pour la relève », explique-t-elle. Mais aussi de permettre d’utiliser des parcelles de terrain qui, autrement, seraient peut-être laissées en friche.
L’organisme propose ses services gratuitement et est complémentaire aux ressources dans ce secteur. Il se distingue toutefois par un accompagnement personnalisé autant auprès des propriétaires que des aspirants.
Pour y accéder, les agriculteurs en herbe doivent avoir fait des études dans le domaine (ou de l’expérience) et proposer un projet d’affaires (il ne peut s’agir de la simple culture d’un potager pour ses besoins personnels) en agriculture ou en élevage. « On couvre large. Il n’y a pas de limite d’âge », ajoute Elizabeth. Parfois, les aspirants sont des jeunes fraîchement sortis de l’école et à d’autres moments il s’agit de personnes plus matures qui se convertissent à l’agriculture.
Parce qu’il faut le reconnaître, pour ceux qui ne sont pas la relève familiale, l’accès à des terres peut s’avérer difficile L’Arterre se veut ainsi un outil pour accéder à des lopins de terre. Et pour les propriétaires, c’est un bon moyen de mettre à disposition des espaces qui, autrement et pour différentes raisons, ne sont pas exploités, et ce, en toute confidentialité. L’organisme peut également s’avérer utile pour ceux qui n’ont pas de relève familiale et cherchent à passer le flambeau.
Le service est particulièrement opportun au Centre-du-Québec où les terres, bien que dispendieuses, sont de bonne qualité et la région bénéficie d’un climat favorable. Par exemple, dans les Bois-Francs et L’Érable, 39 propriétaires sont inscrits et actifs à l’Arterre (75 pour tout le Centre-du-Québec). Du côté des aspirants, on en compte 71, mais ceux-ci peuvent être inscrits dans plus d’une région où l’Arterre offre ses services. Quant au processus, il peut être plus ou moins long, mais mérite qu’on y mette tout le temps nécessaire puisqu’il s’agit d’un choix de vie important.
« C’est une alternative d’avenir qui permet de rendre plus accessible l’agriculture en plus de ramener des gens en région », soutient Elizabeth. Le jeune organisme a de son côté des défis à relever, notamment de se faire connaître davantage, mais également à poursuivre la mise en place d’une structure fonctionnelle et efficace pour tous les partis concernés.
L’histoire de Mathias
Mathias Conroy est un exemple d’aspirant-agriculteur inscrit à l’Arterre et qui a bénéficié des services. Français d’origine, il est venu au Québec en 2014 pour faire des études en technique de gestion et d’exploitation agricole au Cégep de Victoriaville. « Au départ, j’aurais voulu acheter, mais je me suis rapidement tourné vers la location », a-t-il expliqué en entretien téléphonique.
Il lui a fallu quelques années et de nombreuses visites avant de trouver la terre de cinq acres qu’il loue aujourd’hui et pour une période de cinq ans à Saint-Louis-de-Blandford (il habite Manseau) pour son projet maraîcher. « Il y avait toujours quelque chose qui bloquait avant. C’était ou bien trop loin ou l’exposition n’était pas bonne, il y avait une pente ou la superficie était trop grande », raconte-t-il. Peu importe, il a persévéré et a eu accès à plusieurs possibilités de jumelage grâce à l’Arterre.
Lorsqu’il a trouvé l’endroit qui répondait à ses attentes, il a rencontré le propriétaire et après discussions, les deux ont fini par s’entendre. C’est donc à la fin de 2020 que Mathias a pu faire ses premières semences. Sur sa terre louée, son projet consiste à cultiver de l’ail et des courges et il vient de terminer sa deuxième récolte qui n’a pas été à la hauteur de ses attentes. Bien entendu, il y a quelques désagréments à la location puisque, par exemple, il n’habite pas à proximité. Il a donc vu cette année ses courges mangées par des chevreuils. « J’ai aussi eu des problèmes de drainage et de limaces. Mais ç’a été une bonne saison pour l’ail », ajoute-t-il.
Même s’il s’agit d’une location, il faut tout de même investir temps et argent pour mettre l’endroit à sa main afin d’y produire ce que l’on souhaite. « Mais ça aide à se bâtir un historique financier », apprécie-t-il. Malgré toutes les embûches et difficultés, Mathias ne regrette pas d’être venu au Canada (Québec) où, selon lui, il est plus facile de se lancer en affaire et de faire de l’agriculture. « Et dans tout cela, l’Arterre a sa place avec sa vocation de concilier des gens qui ont parfois des positions inconciliables. C’est un service important, surtout pour les jeunes qui ont ainsi accès à une banque de terres à louer. Ça leur montre qu’ils ne sont pas tous seuls », termine Mathias.
Ce dernier a obtenu un bon appui auprès de l’organisme et y a trouvé beaucoup plus qu’un simple lopin de terre. C’est en effet lors d’une réunion de l’Arterre qu’il a rencontré celle qui partage aujourd’hui sa vie.