«Je ne me sens pas moins gars parce que j’ai demandé de l’aide»
Retourner en thérapie pour un mois en janvier dernier a été éprouvant pour l’ancien joueur de football Étienne Boulay. «On entre en thérapie la tête entre les jambes. Mais je ne me sens pas moins gars ou moins «tough» parce que j’ai demandé de l’aide. Ce n’est pas tant courageux qu’égoïste puisque je l’ai fait pour moi!»
Pour ces mots et pour l’ensemble de sa conférence, Étienne Boulay a reçu une chaude ovation debout de son auditoire de quelque 700 personnes, dont beaucoup de jeunes, mercredi soir au Carré 150.
Il était l’invité du Comité des usagers d’Arthabaska-et-de-L’Érable, d’Espace jeunesse et du mouvement Hop la Ville de Victoriaville.
Il a livré un témoignage d’un peu plus d’une heure, racontant son parcours depuis ses études secondaires jusqu’à aujourd’hui, s’attardant tout autant à ses réussites qu’à ses chutes et rechutes, au football comme dans sa vie personnelle.
Sa route a été parsemée d’aussi retentissants succès que de rudes épreuves. Ayant consenti d’énormes sacrifices pendant 15 ans pour atteindre son objectif de jouer au football chez les professionnels, il aurait pu s’écraser définitivement dès son premier match avec les Alouettes de Montréal où il a évolué entre 2006 et 2008 et entre 2009 et 2010. Une blessure à la jambe a failli mettre fin à sa carrière. Et il a subi de nombreuses commotions cérébrales tant avec les Jets de New York qu’avec les Argonauts de Toronto avec lesquels sa carrière a pris fin en 2013.
Même ceux qui ne s’y connaissent pas en football ont pu imaginer les stratégies et les jeux auxquels s’est adonné celui qu’on surnommait le «Bull». Ils ont aussi pu saisir les raisons pour lesquelles il a tant aimé le football, un sport d’équipe et de contact, une discipline quasi militaire requérant le respect de la hiérarchie, l’esprit de famille. Et, heureusement, a-t-il ajouté, le foot s’accroche à l’école. «Tu ne joues pas si tu n’as pas de bonnes notes.»
Il a su parler, parfois même avec humour, des moments les plus dramatiques de sa vie, même de sa tentative de suicide. Il voulait en finir avec le cercle vicieux dans lequel il s’était empêtré; il avait honte de consommer et il consommait parce qu’il avait honte. «Je ne voulais plus être un fardeau pour les autres.»
Lui qui se dépeint comme un gars «l’fun», un «bon vivant», a dit que cette tentative l’avait «démasqué». «J’étais éteint. Quand tu te réveilles à l’hôpital, branché à des machines, tu ne peux pas dire : «Vous capotez pour rien!»
Il a aussi parlé de son TDAH (trouble du déficit de l’attention et hyperactivité) ce qu’il fait depuis peu. Il dit que le diagnostic l’a en quelque sorte «déculpabilisé», s’étant toujours perçu comme un «p’tit vite», un intense et un étourdi.
Encore récemment, il a admis qu’après un an et demi de sobriété, il avait dû retourner en thérapie, ayant «rouvert» la porte de la consommation se croyant capable de la contrôler. Porte-parole pour Bell cause pour la cause, il avait dévoilé son secret, ne voulant pas se sentir comme un «imposteur» au risque d’être «étiqueté».
S’il a commencé sa conférence en annonçant qu’il ne voulait pas donner de conseils, il n’a pu s’empêcher de le faire à la fin, reconnaissant avoir «menti».
L’un de ses conseils lui vient de sa mère qui, à la suite de son placage, lui avait simplement recommandé de se concentrer sur ce qu’il pouvait contrôler.
Il dit aussi qu’il faut se coller à des gens «nourrissants», qui ne sont pas nécessairement toujours d’accord, mais qui sont capables de dire la vérité. «Du mauvais monde peut vous pourrir la vie.» Il a poursuivi en disant de tendre la perche à ceux dont on s’inquiétait et à ceux qui ne vont pas bien de «sortir le méchant» auprès d’un ami, d’un membre de sa famille, d’un intervenant.
Il a également conseillé de se fixer un plan, une direction, des objectifs et de prendre les moyens pour les réaliser. Devenu animateur et conférencier, il dit avoir plein de projets… qu’il n’a pas voulu révéler; sa liste est dressée. Il a dit que même si la vie n’était pas parfaite, il avait le goût de se lever tous les matins et que sa plus grande réalisation était celle d’être un papa présent pour ses deux enfants. Il n’est pas sans penser que s’il s’était enlevé la vie, ils auraient grandi «fuckés».
À celle qui lui demandait comment les Vulkins devaient se préparer à disputer leur prochain match contre les Gaillards à Jonquière, il a répondu qu’ils devaient faire fi des distractions, lâcher Facebook et les textos pour se concentrer sur leur «bild-up émotif» et sur l’étude du «game plan» de leurs adversaires. C’est bien peu de jours de sacrifices pour se garantir de beaux souvenirs… Ils pourront faire la fête par la suite, a-t-il conclu.