La Route-dont-on-ne-doit-pas-prononcer-le-nom
J’habite à Warwick, au Centre-du-Québec. Il y a sept ans, avec ma famille, j’ai quitté l’effervescence montréalaise pour prendre racine dans cette petite municipalité.
Nous y avons découvert des gens sympathiques, une foule de services, de beaux paysages, bref tous les avantages d’une petite ville dans la campagne. Mais il y a une ombre à ce joli tableau. Tout près de cet endroit bucolique se terre un monstre impitoyable. Cette créature a pris l’apparence d’une longue route, mais en vérité, c’est un monstre, en genre de serpent long et sinueux, avec une ligne jaune sur le dos. Il m’est interdit de révéler le nom de ce monstre-route, car une croyance locale veut qu’à chaque fois que quelqu’un prononce le nom de cette créature maléfique, elle tue une personne de plus, comme ça, au simple hasard de sa folie meurtrière. La Route-dont-on-ne-doit-pas-prononcer-le-nom est tortueuse, vicieuse et impitoyable.
Elle broie ses victimes sans considération d’âge ou de sexe. D’une rigueur mécanique, elle tue autant les résidents de la région que les touristes et autres voyageurs. En automne, la créature souffle de toutes ses forces pour vous déstabiliser. En hiver, sa carapace glissante vous envoie dans le décor. Mais toujours, la bête est rusée : elle aime vous mettre en confiance, vous amadouer pour ensuite vous surprendre derrière l’une de ses proéminences. Et là, sa gueule grande ouverte vous attend, sertie de crocs métalliques. Dans son estomac : la mort. C’est notre Fléau, notre Malédiction, notre Voldemort à nous. Ne sous-estimez jamais la cruauté de la Route-dont-on-ne-doit-pas-prononcer-le-nom.
François-Jude Mercier