Le cavalier urbain comparaît en Cour municipale

La juge Martine St-Yves de la Cour municipale de Victoriaville a commencé à entendre, mercredi matin, les dossiers de Jean Roy, connu sous le nom du cavalier urbain. Le Victoriavillois, âgé de 55 ans, conteste les nombreux constats d’infraction qui lui ont été signifiés.

Au départ, le quinquagénaire faisait face à 48 constats d’infraction, mais la procureure de la Ville de Victoriaville, Me Rosane Roy, a procédé au retrait de 19 constats en raison de l’absence de témoins ou de certains éléments de preuve.

Ainsi, 29 constats font l’objet de débat. En avant-midi, mercredi, le procès a été tenu sur quatre de ces constats,

La première infraction remonte au 4 novembre 2015 et n’est cependant pas reliée au cheval du cavalier urbain.

Ce jour-là, Jean Roy, venu visiter un proche, a refusé, à la demande du personnel, de quitter l’établissement hospitalier.

Un agent de sécurité, Dany Poisson, a été entendu en poursuite. Il a relaté les circonstances, avouant que M. Roy était calme, qu’il ne se montrait pas menaçant.

Jean Roy, en défense, a plaidé qu’on a agi illégalement à son endroit. «J’étais dans mes droits. Mes intentions étaient pacifiques. Je suis une personne pacifique, un homme de foi. Personne ne m’empêchera d’aider quelqu’un, à moins de détenir un papier signé. J’ai la paix en moi. C’est avec la paix qu’on arrivera à quelque chose, pas avec la guerre», a-t-il soutenu.

Le Victoriavillois a affirmé suivre les lois à la lettre. «Les lois sont bien faites, mais des fois, les gens les utilisent mal», a-t-il noté.

La juge St-Yves a pris sa décision en délibéré.

Nuisance équestre

La Cour municipale a ensuite entendu deux autres dossiers, des infractions survenues le 13 juillet 2016 en fin de journée et en soirée, l’une d’avoir gêné la circulation et l’autre pour un cheval laissé sans surveillance.

D’abord, Mathieu Beaudoin, qui agissait comme cadet policier pour la Sûreté du Québec, a raconté ce qu’il a constaté ce jour-là vers 17 h 45 à l’intersection de la rue Notre-Dame Est et du boulevard des Bois-Francs Sud.

Il a reconnu Jean Roy sur sa monture en milieu de l’intersection en présence de plusieurs automobiles, empêchant certains usagers de pouvoir effectuer un virage. «À un moment, le cavalier a effectué le tour d’une motocyclette. Un automobiliste a dû se tasser», a-t-il dit.

En défense, Jean Roy a fait valoir qu’il contrôlait son animal. «C’est un cheval «hot», qui a du potentiel. Ce n’est pas un piton», a-t-il soutenu, rappelant qu’il est venu 70 fois en ville à cheval en trois ans et qu’aucun accident n’est survenu.

«Êtes-vous en faveur du règlement (adopté par la Ville)?», a-t-il osé demander au témoin.

La magistrate l’a interrompu. «Vous n’avez pas à répondre à ça», a fait savoir la juge au témoin, estimant qu’on s’écartait du sujet, situation qui est survenue à plusieurs reprises au cours de l’avant-midi, amenant la procureure de la Ville à se lever pour soulever une objection.

«Êtes-vous certain hors de tout doute que je constituais une nuisance?», a interrogé M. Roy. «Oui, hors de tout doute parce que moi-même j’ai changé mon itinéraire, parce que la présence de M. Roy a empêché certains de tourner et qu’un véhicule a dû se tasser», a répondu Mathieu Beaudoin, certain aussi de la date du 13 juillet puisqu’il a lui-même contacté la Sûreté du Québec ce jour-là.

Le cavalier urbain, pour sa part, a soutenu qu’aucune photo, qu’aucune preuve ne démontrait qu’il a gêné la circulation, que tout ce qu’il a fait est légal. Il estime qu’il s’agit d’une mauvaise perception chez le cadet policier.

Ce même jour, à 20 h 10, à la Vélogare, on reproche à Jean Roy d’avoir laissé son cheval sans être attaché, le laissant libre, le laissant brouter. «Je confirme que c’est vrai», a lancé le cavalier urbain. «Je le laisse brouter paisiblement. Il n’y a pas de raison qu’il se sauve. Mon cheval était sous surveillance adéquate et sécuritaire. Je ne l’ai pas laissé sans surveillance», a confié M. Roy, qui se trouvait à proximité.

Autre dossier que la juge St-Yves a pris en délibéré.

La veille de Noël

Jean Roy s’est aussi vu remettre un constat pour avoir gêné la circulation le 24 décembre 2015 à 16 h 35 à l’angle des boulevards Jutras Est et des Bois-Francs Sud.

Un constat que lui a remis l’agent Bobby Melançon. En fait, ce jour-là, le policier lui en avait décerné trois, mais deux de ces constats ont été retirés. «Avez-vous quelque chose contre moi?», a questionné le cavalier. «Non», a répondu l’agent.

«Savez-vous pourquoi je suis venu à Victoriaville à cheval le 24 décembre? C’est pour rendre heureux du monde comme vous», a continué M. Roy.

L’agent Melançon a expliqué les raisons ayant mené à la rédaction d’un constat d’infraction. À l’intersection en cause, en direction nord sur des Bois-Francs Sud, le cavalier, a relaté le policier,  se trouvait la voie de droite réservée au virage à droite (sur Jutras Est). «Non seulement le cheval a-t-il empêché certains véhicules de tourner à droite, mais la bête, en piétinant, a empiété sur le boulevard Jutras Est, obligeant certains usagers à se tasser», a indiqué l’agent de la SQ.

Quand le feu est devenu vert, le cavalier, a confié le témoin, a poursuivi sa route tout droit pour aller emprunter le trottoir après avoir franchi l’intersection.

À un certain moment, Jean Roy a laissé entendre que le policier mentait. «C’est à moi d’évaluer la crédibilité», a fait valoir la juge St-Yves tout en l’invitant à s’abstenir des commentaires qui peuvent miner la crédibilité.

À la question du cavalier à savoir si le policier avait pris une photographie de l’infraction, la présidente du Tribunal a expliqué qu’une photo pouvait constituée un supplément, mais que ce n’était pas un élément essentiel. «Tout repose sur la crédibilité, sur les détails et sur tout le contexte de la preuve soumise», a souligné la juge.

Le ton a quelque peu monté quand la procureure de la Ville s’est opposée à la question de Jean Roy à savoir si le policier savait que son cheval avait été confisqué. «Il faudra que ça arrête à un moment. C’est  comme un jeune dans une cour d’école qui se fait intimider, harceler», a exprimé le cavalier qui s’était dit, plus tôt en matinée, victime d’intimidation  et de harcèlement.

«Je comprends ce que vous dites, mais ce n’est pas de la compétence de la Cour municipale. Je comprends vos doléances envers la Ville et la police, mais ce n’est pas pertinent, ici», a répliqué Me Rosane Roy.

En défense, Jean Roy a plaidé qu’il n’avait pas gêné la circulation. Après avoir dit que son cheval s’était arrêté avant la ligne d’arrêt, il a ensuite révélé que «probablement, à 99%, je me trouvais sur le trottoir».

Se représentant seul, Jean Roy, à la fin de son contre-interrogatoire de l’agent Melançon, lui a demandé s’il croyait au père Noël. «Moi j’y crois, joyeux Noël. M. Melançon», a-t-il conclu.

«Pareillement», lui a répondu l’agent.