Deux seuls Canadiens à l’Eurac… et ils proviennent d’ici

VICTORIAVILLE. On dira que la vie a de ces drôles de hasards. On dira aussi que le monde est bien petit. Toujours est-il que deux jeunes originaires de la région, Aimée Bourassa de Tingwick et Jean-Sébastien Blais de Plessisville, se sont retrouvés, deux seuls Canadiens «élus», à la prestigieuse école d’hiver de l’Académie européenne de Bolzano (Eurac) en Italie.

La formation intensive a été offerte, en deux temps, à Innsbruck en Autriche et à Bolzano en Italie, à 31 participants provenant de 22 pays au début du mois de février.

Jean-Sébastien, 36 ans, Aimée Bourassa, 25 ans, ont été choisis parmi quelque 300 candidats désireux de participer à la session intensive portant sur le fédéralisme et la gouvernance, plus particulièrement la participation démocratique. La qualité académique et professionnelle de leur curriculum leur a valu d’être sélectionnés.

Jean-Sébastien raconte leurs éclats de rire quand Aimée et lui ont réalisé qu’ils provenaient tous deux des «Bois-Francs» comme il dit. Et il n’y avait rien d’évident à cela puisque lui vit et travaille au Yukon depuis quatre ans, alors qu’Aimée, étudiante au doctorat à l’Université Brown, réside à Providence aux États-Unis (près de Boston) depuis un an et demi.

Au gouvernement du Yukon, le fils de Guy Blais et de Nicole Pépin travaille comme analyste du marché du travail, cherchant à attirer la main-d’œuvre dont le territoire a besoin pour rester compétitif. Jean-Sébastien vit avec sa conjointe torontoise et il est papa de deux garçons.

Fille des architectes Micheline Gaudreau et André Bourassa, Aimée en est à sa deuxième année à Providence, après avoir vécu en Argentine et au Mexique, orientant ses recherches sur la gouvernance politique et le logement social en Amérique Latine. Elle a choisi l’Université Brown pour étudier avec les profs Richard Snyder et Rebecca Weitz-Shapiro.

Des trajectoires différentes

Tous deux, par des chemins différents, ont voulu participer à la formation offerte par l’Académie européenne de Bolzano. Tous deux ont mené leurs études universitaires en sciences politiques. Et tous deux, elle par ses recherches, lui par son travail au gouvernement du Yukon, se passionnent pour des sujets comme la gouvernance, la participation citoyenne, la démocratie.

Ils abordent ces thèmes avec toutes les nuances requises.

Jean-Sébastien dira qu’il faudrait souhaiter que, par les consultations publiques, les gouvernements cherchent autre chose qu’à «contrôler le message». «Quand verra-t-on un gouvernement, municipal par exemple, définir avec les citoyens ce que sera la municipalité dans 15 ans?» Au Yukon, cet exercice d’imaginer le Yukon 2020 a été fait et les ambitions exprimées alors s’avèrent finalement plutôt réalistes, selon lui.

Aimée répondra qu’est partagée la responsabilité de la dégradation des relations entre élus et citoyens. Il faudra créer de nouveaux «forums» pour secouer l’apathie, le cynisme et la méfiance, croit-elle. Le scrutin aux quatre ans demeure un instrument bien imprécis, admet-elle, et, trop souvent, la participation citoyenne n’est malheureusement que réactive. Inciter les citoyens à offrir leur contribution à la gouvernance nécessitera ouverture et transparence de la part des élus, poursuit-elle.

Au-delà des thèmes abordés, la formation intensive attirait Aimée et Jean-Sébastien désireux de confronter théorie et pratique.

Ces deux semaines ont constitué pour elle un moyen de sortir de son travail de chercheuse pour aller à la rencontre de praticiens dans le quotidien. Les participants à l’école d’hiver sont des chercheurs, des fonctionnaires et des gens oeuvrant pour des organisations non gouvernementales ou des organismes à but non lucratif.

Jean-Sébastien voulait participer à l’école d’hiver afin de confronter l’initiative de coordination qu’il coordonne depuis trois ans. «J’allais tester ma méthode de consultation, alors qu’on travaille, sur des projets environnementaux, avec plusieurs instances comme les premières nations, l’industrie, etc. Je veux m’assurer d’avoir des recommandations éclairées.»

Aimée et Jean-Sébastien reviendraient-ils dans leur patelin?

Disant aimer énormément sa région natale et se sentir redevable à ses éducateurs – il a fait partie d’une des dernières cohortes du Collège d’Arthabaska, finissant en 1996 et son directeur de maîtrise à Laval était l’actuel ministre François Blais – Jean-Sébastien répond qu’il aimerait bien un jour revenir chez lui… y apporter sa contribution. «Si on a besoin d’un analyste avec des idées créatives!» Engagé dans sa communauté d’adoption, le jeune homme est membre de la Commission scolaire francophone du Yukon, laquelle revendique la pleine gestion scolaire jusque devant la Cour suprême. Il est aussi membre du comité réviseur des droits de la personne.

Ses études doctorales maintiendront Aimée pour trois ou quatre autres années à Providence. Après? La jeune femme ne sait trop si elle maintiendra le cap sur la recherche ou si elle se dirigera vers l’enseignement ce qui pourrait la ramener dans une université québécoise.