Ferme Val-des-Bois : se relever pour mieux reconstruire
Marc-André Boisclair, propriétaire de la ferme Val-des-Bois, et sa conjointe, Danaé Veilleux, ont passé la dernière année à mettre les bouchées doubles afin de reconstruire leur ferme après qu’une catastrophe soit venue chambouler leur petite vie paisible.
En octobre 2023, en plein milieu de la nuit, deux de leurs trois silos se sont effondrés, emportant dans leur sillage 1200 tonnes de maïs ainsi qu’une partie de leur bâtiment. Un an plus tard, les travaux tirent enfin à leur fin.
« C’était le 8 octobre à minuit et quart. J’ai entendu un vacarme de la maison. Un silo était tombé sur l’autre silo, et les deux étaient tombés sur la partie de l’étable qui contenait nos robots de traite neufs, la laiterie et la salle du mélangeur », se rappelle Danaé. Deux vaches ont également péri dans l’effondrement.
« L’étable n’était plus fonctionnelle », ajoute-t-elle. Heureusement, en deux coups de téléphone, le couple a réussi à relocaliser ses quelque 180 vaches, le temps d’avoir un endroit sécuritaire et confortable à leur offrir. À ce jour, Danaé et Marc-André n’ont toujours pas retrouvé leur troupeau. Ils espèrent qu’elles rentreront au bercail en décembre prochain, une fois les travaux de reconstruction terminés.
Une pensée vers l’avenir
À la suite de l’effondrement des silos, le couple s’est demandé s’il souhaitait reconstruire. La remise en question a été de très courte durée : il n’était pas question de mettre leur ferme de côté. « C’était clair et net qu’on repartait, lance Danaé. Le petit découragement est plutôt arrivé au mois de décembre, parce que ça a quand même pris du temps à enlever les décombres. Quand on a arraché la partie de l’étable et qu’il ne restait plus rien, on a dû arrêter pour l’hiver. On se demandait ce qu’il allait se passer avec notre vie. »
Aujourd’hui, ils ont bien hâte de reprendre leur petite routine. Danaé confie commencer à se sentir comme en prison dans son bureau à remplir de la paperasse pour des permis, des plans, des soumissions ou encore les réclamations d’assurance.
Le couple a profité de la reconstruction pour améliorer ce qu’il possédait déjà en investissant 1 M $ supplémentaire dans l’entreprise.
Marc-André et Danaé ont passé tout l’hiver à élaborer les plans de leur nouvelle ferme. Tout d’abord, on a mis de côté l’idée de reconstruire des silos debout et on s’est plutôt tourné vers des silos-fosses, craintif de vivre un effondrement de nouveau. Le couple n’en connaît d’ailleurs pas la raison; le silo défaillant n’était âgé que de 20 ans, alors que des silos de 50 ou 60 ans tiennent encore debout. Pour ce qui est du silo survivant, il sera rigoureusement inspecté lorsqu’il sera vidé de son ensilage afin d’en déterminer l’avenir.
La laiterie a également été changée de place et a été reconstruite à l’arrière de la ferme, plutôt qu’à l’avant comme auparavant, et tout a été pensé pour être facilement agrandi et que leurs enfants ne soient pas limités dans leurs ambitions, si jamais ils voulaient prendre la relève. Ils sont pour l’instant âgés de 10 et 13 ans, et adorent le travail à la ferme. « Il faut toujours penser que le lait se fait proche de la laiterie. C’est le cœur de l’entreprise », rappelle Marc-André Boisclair.
En plus d’optimiser leur lieu de travail, le bien-être des vaches a aussi été repensé avec l’ajout de ventilation, de buvettes supplémentaires, de tapis neufs et l’acquisition de réserve en ensilage « combox » pour nourrir le troupeau à partir du silo-fosse.
« Les vaches vont être bien. On va être mieux dans l’étable que dehors, en tout temps », assure Marc-André.
Les vaches étaient déjà en stabulation libre avec deux robots de traite DeLaval et les veaux seront relocalisés plus loin de la fosse. Côté population, ils auront le même nombre de tête.
L’agriculture en territoire éolien
Les opinions sont divisées dans la population au sujet du projet éolien dans la MRC de Nicolet-Yamaska, et cela ne fait pas exception chez les agriculteurs. De son côté, Marc-André Boisclair a choisi son camp : il est en faveur du projet éolien.
« Les gens augmentent leur consommation d’électricité et c’est un problème auquel on va devoir faire face très bientôt, estime Marc-André. Quelles sont nos options? Une autre centrale nucléaire? Je ne suis pas sûr que ça passe. Un autre barrage électrique qui est en fait un désastre naturel caché? On ne pourrait pas refaire ça aujourd’hui », ajoute-t-il.
Marc-André est convaincu que la liste des avantages est nettement suffisante pour faire oublier la liste des désavantages. « Je ne vois pas vraiment de négatif là-dedans, dit-il. Je sais qu’il y en a, il n’y a jamais rien de parfait dans la vie, mais je vois surtout des avantages associés au projet. » Il note parmi ceux-ci les revenus aux citoyens et à la ferme qui sont non négligeables.
Marc-André considère aussi dans les avantages le chemin d’accès pour se rendre à l’éolienne à l’année qui ne relèvera pas de sa responsabilité, mais qu’il pourra emprunter avec sa machinerie.
Il n’est pas inquiet pour le bruit ou encore pour la quiétude de ses vaches, à cause de la distance importante du potentiel positionnement d’une éolienne, si ses terres étaient choisies pour en accueillir une. « Ils placent les éoliennes selon plein de critères assez exigeants pour protéger la population », insiste-t-il.
Il compare également la situation aux pylônes électriques autrefois imposés aux agriculteurs sans qu’ils reçoivent d’argent en échange. « Si on continue à se borner, on va finir par se faire imposer les éoliennes et le montant qui vient avec », croit-il. Il estime aussi que les éoliennes, contrairement aux pylônes, sont moins dérangeantes, car elles ne posent pas de risque d’accrocher de fils électriques avec la machinerie qui est de plus en plus imposante. « Et personnellement, je trouve ça beau, une éolienne », conclut-il.
À la ferme de père en fils
Marc-André Boisclair est la quatrième génération propriétaire de la ferme Val-des-Bois. C’est son arrière-grand-père qui a démarré la ferme. « C’était tout petit et il faisait un peu de tout. Poulets, cochons, patates, miel. À un moment donné, le créneau s’est concentré sur les vaches avant de s’y consacrer exclusivement », raconte Marc-André Boisclair.
Par Stéphanie Paradis