J.U. Houle : une quatrième génération à sa tête

Quatre générations plus tard, l’entreprise J.U. Houle de Victoriaville, spécialisée dans la distribution de matériaux de plomberie, de chauffage et de produits municipaux et industriels, poursuit son chemin, desservant ses clients à la grandeur du Québec.

Laurent Houle, 29 ans, c’est lui, la quatrième génération. Avec son père Jean, qui songe à une retraite éventuelle, il dirige l’entreprise qui emploie une soixantaine de personnes.

Une entreprise dont l’histoire remonte aux débuts des années 1930. Tout a commencé avec Joseph Uzéric Houle. « C’est mon grand-père, un plombier-ferblantier, raconte Jean. Il a démarré son atelier portant son nom J.U. Houle derrière sa maison en face de l’église Sainte-Victoire. »

Une vingtaine d’années plus tard, dans les années 1950, Gérard Houle (père de Jean) et son frère Jules ont rejoint leur père, un entrepreneur en plomberie, chauffage et ventilation.

Tout ce beau groupe a déménagé en 1957 sur un terrain en face du Cégep sur ce qui était alors le boulevard Sainte-Anne devenu par la suite la rue Sacré-Cœur. « Cette année-là, précise Jean Houle, ils ont aussi changé la vocation de l’entreprise. Ils sont passés d’entrepreneurs et d’installateurs à distributeurs grossistes. Ils ont alors cessé de faire des chantiers pour devenir distributeurs. Ils vendaient aux plombiers. »

Ils ajoutent une nouvelle corde à leur arc en 1961 : le volet municipal. « C’est moins connu du grand public, dit Jean. Vous voyez les bornes-fontaines et les couvercles de trous d’homme. Mais nous, nous vendons tous les tuyaux. »

Mouvement dans l’entreprise

En 1982, Gérard Houle devient l’unique actionnaire lorsque son frère Jules lui vend ses parts de l’entreprise.

Jean arrive au sein de J.U. Houle en 1986. Il en devient actionnaire en 1990. Son frère Pierre le rejoint en 1994. « Et l’année suivante, en 1995, nous avons acheté les actions de mon père », se remémore Jean Houle. 

En 2009, les deux frères déménagent leur entreprise dans un nouveau bâtiment construit dans le parc industriel sur la rue François-Bourgeois.

La quatrième génération se pointe en 2017. Laurent Houle, après ses études, arrive à temps plein dans l’entreprise qu’il connaît très bien pour y avoir occupé, durant sa jeunesse, des emplois d’été. « Comme toute la famille d’ailleurs », souligne Jean.

Laurent et son père Jean sont maintenant les deux seuls actionnaires de J.U. Houle. En octobre 2023, ils ont acheté les parts de Pierre Houle (frère de Jean), mûr pour la retraite. « Il n’avait pas de relève à lui, il nous en a parlé. Il avait d’autres projets. Il faut dire aussi que ça n’a pas été de tout repos avec la pandémie. Cela a accéléré les choses, comme bien d’autres d’ailleurs », observe Jean Houle.

Destin

Laurent Houle assure ne pas avoir senti une pression quelconque de ses parents pour faire partie de l’entreprise. Il y songe depuis l’adolescence. « Mon premier souvenir remonte à 16 ans. Il y avait un intérêt naturel de ma part, probablement pour les affaires, mais aussi parce que  mon modèle a été mon père. Je l’ai vu 

être en affaires. J’ai donc fait mes études avec, en tête, l’idée que j’intégrerais l’entreprise. »

Son père lui suggérait de se trouver des compétences complémentaires et durables dans le temps et qui ne sont pas nécessairement remplaçables par une spécialité et que l’entreprise ne possède pas.

Laurent Houle a donc obtenu un baccalauréat, profil administration, en plus d’avoir suivi un profil entrepreneurial et ressources humaines.

En intégrant l’entreprise à temps plein, Laurent a continué à toucher à la réalité d’à peu près tous les départements. « J’ai commencé comme directeur général adjoint, un peu comme un chargé de projet. Je regardais comment tout fonctionnait et je pouvais mener des projets, car personne ne dépendait de mon intervention quotidienne et j’avais du temps. Ça m’a permis de voir le fonctionnement des choses, souligne-t-il. Puis, en 2018, je me suis retrouvé à la direction des ventes durant deux ans environ. On s’est vraiment concentré, à ce moment, à faire croître la plomberie. »

Récemment, l’entreprise, disposant d’une ressource technique à cette fin, a décidé d’intégrer des lignes d’échangeur d’air et de thermopompe.

Le bon choix

« Je ne ferais pas autre chose », lance Laurent Houle, confirmant ainsi qu’il a fait le bon choix, une décision dictée par une soif de liberté. « J’avais un désir de liberté et d’autonomie dans ma vie. J’ai eu des emplois d’étudiants et je trouvais que je n’avais pas mon espace pour m’exprimer et partager ma vision. Être à son compte vient bien sûr avec une responsabilité, mais c’est la plus belle manière de créer sa propre liberté », exprime-t-il.

Son père Jean est bien heureux de la tournure des événements. « Je pense et j’espère que Laurent a eu un plus grand support de ma part que moi j’en ai eu de mon père, confie-t-il. On a beaucoup travaillé avec Laurent. Il y a eu des évaluations et du coaching. Son cheminement n’est pas le même que celui que j’ai eu avec mon père. Mais Laurent a aussi réalisé beaucoup de choses par lui-même. »

Avant de céder complètement les rênes de l’entreprise à son fils, Jean se donne comme dernier grand mandat, celui de s’assurer de la présence d’une bonne équipe autour de Laurent pour assurer la pérennité de l’entreprise. « Il ne serait pas difficile de vendre. Ça cogne à la porte. Mais je souhaite voir cette entreprise croître, continuer et demeurer au Québec », fait savoir Jean Houle.

Depuis 1961, l’entreprise a ajouté des gammes de produits, mais elle est demeurée essentiellement dans les mêmes marchés. « Notre plus grande clientèle, ce sont les entrepreneurs en excavation, les plombiers et les municipalités. Au fond, on vend aux installateurs. Nous, on s’occupe de rassembler tous les produits que ça prend, on a accès à toutes les gammes de produits, autant en plomberie qu’en aqueduc. On rassemble les produits et souvent on les livre aux chantiers », mentionne Jean Houle.

Des projets?

En 2020, J.U. Houle a investi près de 1,5 M $ pour agrandir d’environ 50% l’entrepôt. Par la suite, la cour extérieure a pris de l’expansion. Elle reçoit le plus gros volume de l’inventaire, comme les matériaux d’aqueduc et d’égout.

« Au niveau des travaux d’infrastructure, je pense qu’on a l’espace pour soutenir encore un volume grandissant, estime Laurent Houle. Le défi ne se situe pas tant au niveau de l’espace extérieur, mais réside plutôt au niveau logistique si on essaie de continuer de grandir. D’avoir le matériel en un seul endroit, ça peut nuire au développement de certaines régions un peu plus éloignées. »

Parce qu’il faut savoir que J.U. Houle possède sa propre flotte de camions et livre le matériel sur les chantiers à ses clients à partir de Victoriaville. « On livre dans un rayon d’environ une heure et demie de route. Au-delà de ça, s’il y avait un marché qui se développait beaucoup, il faudrait regarder une option de deuxième site. S’il y avait des investissements à faire, ce serait pour un nouveau site géographiquement placé ailleurs pour se rapprocher du marché », explique Jean Houle.

Le service à la clientèle, voilà l’une des forces de l’entreprise, la proximité avec les clients. « Notre flexibilité et efficacité opérationnelle nous permettent aussi de nous différencier  des autres », avance Laurent.

L’harmonie

Le récent transfert de l’entreprise s’est fait harmonieusement. « On est encore les frères Houle », lance Jean. « La réussite, ce n’est pas juste en affaires, c’est aussi d’avoir préservé l’esprit de famille », fait valoir Julie Laroche, conseillère aux entreprises spécialisée en repreneuriat à la Corporation de développement économique et sa région (CDEVR) qui a accompagné l’entreprise. « Nous avons facilité l’accès à une subvention pour défrayer une partie des honoraires professionnels engendrés par un transfert. C’est assez phénoménal ce que ça prend, les procédures légales, fiscales et comptables et ça coûte cher », observe-t-elle.

Pour Laurent, il n’est pas difficile de faire équipe avec son papa. « Je suis fier aujourd’hui de dire que je suis en affaires avec mon père. Je suis reconnaissant, même s’il parle de sa préretraite, de vivre ses moments avec lui. »

Humble, le jeune homme ne cherche pas à attirer l’attention sur lui. En fait, son souhait est que l’équipe rayonne, que l’entreprise performe. « Tant mieux si l’entreprise demeure familiale, si nous en sommes à la quatrième génération parce que ce n’est pas fréquent. Mais c’est le travail de 60 autres fourmis qui fait que ça fonctionne bien. On est chanceux de les avoir, des gens passionnés par ce qu’ils vivent ici », conclut-il, tout en insistant sur l’importance de véhiculer le message comme quoi on peut réussir en reprenant une entreprise, qu’il y a autant de fierté de le faire qu’en lançant une nouvelle entreprise.