Marché de l’emploi : un certain ralentissement, à l’image de l’économie

Si actuellement on remarque un certain ralentissement au niveau économique, cela se répercute du côté de l’emploi où les opportunités connaissent également une baisse de régime.

Interrogée à ce sujet, Nancy Capistran, consultante en ressources humaines et propriétaire de son entreprise spécialisée en services de gestion du personnel, Altitude ressources humaines, remarque que le secteur de la construction est particulièrement touché. « Et pour ce qui est du recrutement, il se colle au cycle économique », explique-t-elle. Tout de même, elle indique que la pénurie de main-d’œuvre, que plusieurs déplorent, est là pour rester longtemps. « C’est normal puisqu’il y a davantage de gens qui prennent leur retraite comparativement à ceux qui arrivent sur le marché du travail. »

Cette pénurie, qui force la créativité des entrepreneurs, a mené jusqu’à maintenant à l’automatisation de certaines tâches ainsi qu’à l’immigration de travailleurs afin de pallier au manque de main-d’oeuvre. L’immigration, si elle demeure une bonne alternative, nécessite tout de même d’intégrer ces gens qui arrivent d’autres pays. « Ils doivent se sentir inclus dans leur communauté », insiste-t-elle. Cela peut se faire de différentes manières et Nancy suggère, par exemple, un parrainage qui aiderait à mieux faire connaître la région d’accueil, ses possibilités et ses attraits. « Si on ne prend pas le temps d’intégrer, il n’y aura pas de rétention », élude-t-elle. Et cette inclusion doit être ressentie autant au niveau du travail que du social.

L’engagement à long terme est chose du passé

La mobilité du personnel est un autre facteur qui contribue à la pénurie de main-d’œuvre actuellement. En effet, les travailleurs n’ont plus cette loyauté à long terme pour leurs employeurs et n’hésitent pas à changer d’adresse lorsque des opportunités se présentent. « Il ne faut pas le prendre personnel, mais trouver des alternatives comme ramener des retraités en leur offrant une souplesse d’horaire », suggère-t-elle. Tous les secteurs semblent touchés par la pénurie de main-d’œuvre, dont le milieu agricole. Dans celui-ci beaucoup d’efforts et d’investissements ont été réalisés pour automatiser certaines opérations, mais il demeure toutefois des travaux qui doivent être faits à la main. 

Les travailleurs de la jeune génération sont cependant de moins en moins enclins à occuper des postes à gestes répétitifs ou routiniers. « Il faut donc diversifier le travail, ce qui a un effet positif autant sur la santé, la sécurité que l’ergonomie. C’est aussi plus intéressant », reconnaît-elle. Pour cela, il est impératif d’adapter la production en fonction des individus afin de créer une ambiance stimulante. « Sans oublier d’offrir aux travailleurs une autonomie, de la valorisation et surtout de la reconnaissance », insiste-t-elle. 

Prendre le temps de recruter

La conseillère en ressources humaines insiste aussi pour sensibiliser les employeurs à l’importance de prendre tout le temps nécessaire pour le recrutement. « À long terme, ce sera avantageux et permettra de trouver les bonnes personnes », fait-elle savoir. Et même dans certains types de postes, où il est difficile de recruter, il ne faut pas pour autant engager la première (ou la seule) personne à poser sa candidature. « Le contrôle des références demeure important afin de voir comment le candidat a quitté son emploi précédent », suggère Nancy, indiquant que cela en disait beaucoup sur la personne.

Il faut aussi prendre en considération autant l’aspect relationnel qu’opérationnel. « Les gens cherchent à être bien dans leur milieu de travail », rappelle-t-elle. Mais malgré tous les efforts, certains types d’emplois demeurent difficiles à combler. Cela s’explique notamment par la formation où, dans certains champs d’action, les élèves se font rares. « Il n’est pas toujours facile d’obtenir un équilibre entre la formation et les emplois disponibles », soutient-elle. 

S’ajoute à cela le manque de places dans les CPE (qui eux recherchent  des éducatrices) qui vient ralentir le retour au travail de certains parents (les mamans en particulier), sans oublier les stéréotypes qui font que certains genres d’emplois sont boudés par les hommes (éducateur en CPE) ou les femmes (emplois dans la construction). « On aurait aussi avantage à reconnaître plus facilement les expériences de travail », ajoute-t-elle.

La valorisation des postes techniques (DEP), ces derniers qui sont indispensables et touchent de bons salaires, l’inclusion des gens en fonction de leurs capacités (comme les personnes vivant avec le trouble du spectre de l’autisme par exemple) sont aussi à considérer. « Ouvrons-nous et faisons preuve de bienveillance », encourage-t-elle.

Nancy Capistran résume donc en identifiant plusieurs éléments à travailler « même s’il y a plusieurs bons coups à souligner », tempère-t-elle. Chaque secteur d’emploi à ses défis, mais le point commun de tous est sûrement qu’il faut offrir aux employés une qualité de vie, un équilibre indispensable entre la vie personnelle et professionnelle, « qui leur permettra de s’accomplir et d’avoir du plaisir au travail », rappelle-t-elle. Parce qu’une personne qui est bien dans son emploi sera plus performante. Mais pour y parvenir, il faut partager la responsabilité entre l’employeur et l’employé, comme elle l’indique si justement.