Ottawa annonce un groupe d’experts pour l’orienter sur la lutte à la haine en ligne
OTTAWA — Le comité d’experts chargé de conseiller le gouvernement Trudeau dans la conception de son projet de loi promis pour contrer le contenu préjudiciable en ligne sera composé de 12 experts qui tiendront neuf tables rondes.
C’est ce qu’a indiqué le ministre du Patrimoine, Pablo Rodriguez, en annonçant mercredi la composition de ce groupe.
«Il y a un consensus sur le fait que les Canadiens veulent que le gouvernement intervienne (et) agisse», a-t-il déclaré. Il a toutefois ajouté que tous ne s’entendent pas sur les façons de faire.
Face à ce constat, le fédéral a voulu «prendre un pas de recul» et utiliser le temps nécessaire pour bien faire les choses, a dit M. Rodriguez en prenant soin de mentionner à plusieurs reprises que certains experts sur le comité ont été critiques de l’approche jusqu’ici mise de l’avant par Ottawa.
Le gouvernement souhaite s’attaquer à la responsabilité des plateformes comme Facebook ou Twitter. «(Elles) ne peuvent pas dire »Écoutez, le contenu est chez moi, mais ce n’est pas moi qui l’ai mis là donc je n’ai aucune responsabilité »», a résumé le ministre.
Parmi les experts sélectionnés pour former le comité, on retrouve David Morin, cotitulaire de la Chaire UNESCO en prévention de la radicalisation et de l’extrémisme violents, le professeur de droit Pierre Trudel, de l’Université de Montréal, et Ghayda Hassan, qui enseigne la psychologie clinique à l’Université du Québec à Montréal.
Le fédéral promet d’agir au chapitre du contenu en ligne préjudiciable depuis longtemps. L’engagement figurait parmi les priorités de Steven Guilbeault quand il occupait le poste de ministre du Patrimoine au cours du premier mandat minoritaire des libéraux de Justin Trudeau.
Peu de temps avant le déclenchement des dernières élections, les libéraux ont déposé le projet de loi C-36 qui visait à donner des outils aux citoyens victimes de haine en ligne. L’initiative, aussitôt morte au feuilleton, devait s’accompagner d’un autre projet de loi qui n’a finalement pas été déposé avant la campagne électorale.
Un cadre législatif et réglementaire avait toutefois été présenté et soumis à une consultation. Il ciblait cinq types de contenu pour lesquels les plateformes devraient avoir une obligation de retrait ou de signalement, soit ce qui a trait au partage non consensuel d’images intimes, aux discours haineux, à l’exploitation sexuelle des enfants, à l’incitation à la violence et au terrorisme.
«On a vu des tensions au niveau des consultations entre un projet de loi à portée plus large et un projet de loi à portée plus restreinte en termes d’organisations (ou) de plateformes qu’il faut éventuellement essayer de réguler», a relevé l’un des experts confirmés sur le comité mercredi, David Morin.
Chose certaine, celui qui enseigne à l’Université de Sherbrooke s’attend à ce que le projet de loi à venir ait un impact significatif. «On a vu dans les derniers temps les enjeux importants que la diffusion des discours haineux ou extrémistes en ligne pouvait avoir non pas seulement dans le monde virtuel, mais dans le monde réel», a-t-il dit en donnant en exemple l’occupation du centre-ville d’Ottawa qui a duré des semaines.